Et voilà, je quitte le refuge du palet direction le lac de la Plagne, le beaufortin et le massif du Mont Blanc.
La descente vers le refuge de Rosuel où je dois récupérer des cartes est douce de pente et de paysage. Je passe au pied du Mont Pourri et ait une pensée affectueuse pour mes parents qui ont tenté plusieurs fois l'ascension, et ont du abandonner chaque fois à cause du temps. Aujourd'hui le pic se dessine sur un grand ciel bleu.
À Rosuel je récupère mes cartes. On me dit que la descente dans la vallée n'a pas grand intérêt. Sottise! Les villes à l'arrivée n'en ont pas, mais la vallée est belle comme un printemps. Sur le chemin, il y cet homme à qui je vais offrir une poignée de framboises et de groseilles. Je ne saurai même pas son nom. Qu'importe...
Les gens me posent souvent la question de "comment je gagne ma vie?". Je me demande en regardant la mousse pourquoi ils s'inquiètent de gagner quelque chose qu'ils ont déjà.
L'étape suivante se fera à côté du refuge de Presset. Là j'aurai l'une de mes plus grandes émotions animalières : une horde entière de bouquetins; 23 mâles, 3 femelles, 7 petits. Tous dispersés dans les éboulis, j'aurai pu les toucher.
Je m'endormirai sous un temps incertain, mais en rêvant au temps où d'immenses troupeaux passaient à quelques mètres des tentes...
(Pas de photos pour l'instant dsl, tout est dans le reflex!!)
Pendant deux jours, je vais marcher sous la pluie.
La pluie a du bon. Elle m'a cueillie avec du brouillard. Elle m'a trempé, m'a rafraîchie, m'a enchantée de ses sons. On vit plus lentement quand il pleut. Il faut laisser la place à l'eau de tomber.
Je me suis perdue et j'ai écouté la forêt boire lentement, avec application.
En tombant l'eau a libéré des odeurs de terre, de paille, et les spores des vesses de loup bien mûres. C'était un douce magie.
Je me suis arrêtée audessus du lac de Roseland, au refuge du plan de la Laie pour sécher. La soirée en compagnie de Philippe, le gardien et Léo son neveu sera chaleureuse, douce et rassurante.
Départ de la Laie dans la purée de poix. Je monte au refuge de La Croix bonhomme par les crêtes sans rien voir. Je suis juste un sentier qui se trace à 2700m d'altitude, et qui n'a que du vide et du blanc autours de lui.
Le temps étant trop mauvais, je passe le reste de la journée au refuge. Une fois de plus, cela permet de belles rencontres et je bénéficie d'un don innespéré de tome et d'oranges.
La nuit sous tente sera très froide. Ils annonçaient de la neige, mais c'est un vent glacial qui souffle et qui fait givrer la pluie directement au contact de ma tente.
Pendant la nuit, je me retrouve face au grand dilemme de tout campeur : aller faire pipi malgré des conditions épouvantables à l'extérieur. Dans mon cas il fallait ajouter le risque de se retrouver face aux traileurs du TMB.
Comme à chaque fois dans cette situation j'attend le plus longtemps possible tout en sachant pertinemment que je n'ai pas le choix. Vingt minutes après, pas de bruit, je sors résignée dans la tourmente.. et me retrouve face à face avec une énorme silhouette noire éclairée d'une frontale! Je me sens comme une bête traquée prise au piège. Je tétanise!
La lumière hésite puis continue sa route, disparaissant en quelques bonds et me laissant dans le noir. Et moi je fonce faire pipi dernière un muret. C'est alors que j'entends les supporter crier "Allez Kilian! Allez Kilian!"...
Je venais de croiser Kilian Jornet, jeune légende de la montagne... les pieds dans la boue et en tenue légère dans la tourmente! C'était l'instant 'Rencontre avec une star'.
Au petit matin, ma tente est tellement givrée qu'elle tient toute seule sans les arceaux. Je dois redenscendre vers les Contamines. J'ai le temps, mais la visibilité est nulle à cause du grésil et du vent qui m'envoie tout en pleine face.
Ça fouette le visage.
Parfois j'arrive à apercevoir des formes sublimes de pulsatiles et de chardons pris dans la glace.
Arrivées aux Contamines, je récupère Léo qui va m'accompagner sur le week end. Et c'est reparti en direction du Massif du Mont-blanc!
